Dans la présente affaire[1], le Dr Quang Hung Nguyen (ci-après « Appelant ») se pourvoit devant le Tribunal des professions (ci-après « Tribunal ») à l’encontre de la décision sur sanction rendue par le Conseil de discipline du Collège des médecins du Québec (ci-après « Conseil »).
Les faits sont les suivants : le 23 décembre 2012, une jeune femme de 20 ans est transportée en ambulance à l’Hôpital Santa Cabrini à la suite d’une perte de conscience. Dans leur rapport, les ambulanciers notent une glycémie de 27.4, soit un taux cinq fois supérieur à la normale. Au triage, une infirmière note un antécédent de diabète et le même taux de glycémie. L’Appelant procède ensuite à son examen sommaire, mais ne consulte ni les notes du personnel ambulancier ni celles de l’infirmière au triage. Il pose un diagnostic de bronchite et donne congé à la patiente. Le même jour, la patiente s’effondre à son domicile et son décès est constaté plus tard à l’Hôpital.
Suzie Daneau, en sa qualité de syndique adjointe (ci-après « Intimée ») du Collège des médecins du Québec (ci-après « CMQ ») dépose une plainte contre l’Appelant lui reprochant d’avoir négligé d’élaborer son diagnostic avec l’attention nécessaire. Elle lui reproche de ne pas avoir questionné adéquatement la patiente et de ne pas avoir tenu compte des notes des autres professionnels. Le 21 septembre 2015, le Conseil rend décision dont appel en qualifiant le comportement de l’Appelant comme étant d’une négligence extrême. L’Appelant se voit imposer une radiation temporaire de six mois.
L’Appelant interjette appel de la décision sur sanction. Le pourvoi soulève les questions suivantes : (1) La décision du Conseil est-elle suffisamment motivée ? (2) Le Conseil a-t-il erré dans l’imposition de la sanction ?
Concernant la première question, le Tribunal rappelle que l’absence ou l’insuffisance de motivation d’une décision constitue une erreur de droit lui permettant d’intervenir et de rendre la décision qui aurait dû être rendue. Les motifs de la décision doivent informer les parties du fondement de celle-ci et permettre un examen efficace en appel. Les conseils de discipline ne doivent donc pas se prononcer sur chaque élément ou argument présenté. Dans le présent cas, le Tribunal rejette l’argument de l’Appelant. Il conclut que le Conseil expose les principes applicables et identifie les facteurs qu’il retient en apportant certaines nuances. De plus, selon le Tribunal, le raisonnement global du Conseil est intelligible et permet un examen efficace en appel.
Concernant la deuxième question, citant Drolet-Savoie[2], le Tribunal rappelle qu’il ne pourra intervenir qu’en présence d’une erreur déterminante. L’Appelant soumet que le Conseil a commis quatre erreurs manifestes et dominantes dans la pondération des facteurs. Premièrement, il reproche au Conseil d’avoir omis de considérer une entrevue orale visant à évaluer sa compétence. Le Tribunal constate que le Conseil ne traite pas de ce rapport. Cependant, le Tribunal précise qu’il ne s’agissait pas d’un problème de compétence, mais bien d’une situation de négligence. Donc, l’omission de référer à ce rapport ne constitue pas une erreur. Deuxièmement, l’Appelant plaide que le Conseil a accordé un poids insuffisant aux remords exprimés et à son engagement à ne plus pratiquer à l’urgence. Rejetant cet argument, le Tribunal estime que les conclusions du Conseil, même si elles déplaisent à l’Appelant, ne sont pas dénuées de fondements. Troisièmement, l’Appelant reproche au Conseil d’avoir accordé une trop grande importance aux avertissements du CMQ. Le Tribunal souligne qu’il est reconnu par la jurisprudence qu’il s’agit d’un facteur pertinent aux fins de déterminer la sanction, particulièrement dans la mesure où ces avertissements font état d’une négligence comme c’est le cas. Quatrièmement, l’Appelant plaide que le Conseil a prononcé une sanction se situant à l’extérieur de la fourchette des sanctions sans en motiver les raisons. Encore une fois, le Tribunal rejette cet argument puisqu’il considère que le Conseil a évalué l’ensemble des circonstances pertinentes au dossier et déterminé la sanction qu’il jugeait appropriée. Le Tribunal rappelle que les précédents doivent guider le Conseil et non le contraindre.
Nous retenons de cette décision que les avertissements d’un ordre à l’endroit d’un membre sont des facteurs pertinents aux fins de déterminer la sanction. De plus, nous tenons à souligner que le Tribunal précise à nouveau que les précédents en matière de sanctions doivent guider le Conseil et non le contraindre.
[1] Nguyen c Médecins, 2018 QCTP 28.
[2] Drolet-Savoie c Tribunal des profession, 2017 QCCA 842.